La journée touchait à sa fin. Le soleil commençait à disparaître à l'horizon et les boutiques des commerçants s'allumaient petit à petit, telles des lucioles se réveillant lentement. Nous avions le sourire aux lèvres. Nous appréciions le regard des passants quand ils nous apercevaient. Certains étaient dégoûtés. Certains n’étaient pas rassurés. D'autres encore semblaient nous admirer. La délectation que cela nous procurait était euphorisante. Nous nous sentions puissants et aimés. Le dégoût ? Il ne nous atteignait pas. Les gens pensaient ce qu'ils voulaient, nous savions qui nous étions. En passant devant la vitrine d'une librairie, nous aperçûmes notre reflet. Nous étions magnifique et l'aura de charisme qui nous entourait était presque visible à l’œil nu. Nous étions sales aussi, mais ce n'était qu'un détail. Et cela prouvait que nous savions nous battre.
La mission de laquelle nous revenions n'avait pas été très difficile. Un petit voleur d'étagères qui faisait le fier. Simple comme bonjour. Cependant, il savait se défendre le petit garnement. Deux heures. Il nous avait fallu deux heures pour en venir à bout. La chasse avait commencé dans la rue avant qu'il ne s'échappe vers un champ encore plein de boue. Nous l'avions laissé courir un peu et puis, alors que nous nous apprêtions à nous jeter à sa poursuite, il est tombé. Le visage dans la gadoue qu'il s'est retrouvé. Ça avait comique. Merveilleusement drôle. Saisissant notre chance, nous avons couru à lui et l'avons maintenu au sol en le retournant. Il s'est débattu sans relâche et après une tentative de fuite sans succès, des menottes de fer ont fini à ses poignets. Nous l'avons ramené aux autorités compétentes, sans nous occuper un instant de son sort. Il pouvait bien finir dans le caniveau que cela nous était égal. Nous avions fini notre travail. 
A présent, nous n'aspirions plus qu'à une bonne douche, un verre et pourquoi pas une fille. Ou un garçon, si l'occasion se présente. Nous commencions donc par la douche en passant à l'auberge qui nous accueillait pour la nuit. Nous en avions pris une modeste. Parce que nous n'étions finalement pas si riche que ça mais que nous ne voulions pas non plus finir sur un lit avec les ressorts nous écorchant le dos. Nous aimions notre petit confort. La douche nous fit du bien et nous fîmes couler l'eau plus longtemps que nécessaire. La crasse s'en alla en frottant légèrement et notre corps resplendissait à nouveau quand nous en sommes sortis. Nous primes des habits habituels. Rien de trop clinquant. Un jean bleu foncé et une chemise blanche, ouverte en haut de trois boutons. La simplicité fonctionne parfois bien mieux. Puis nous sommes descendus et sommes sortis dans la rue. Nous ne faisions que marcher sans réel but. Les bars devant lesquels nous passions ne nous inspiraient pas tellement et, bien que la nuit commence à se faire fraîche, nous préférions attendre d'en trouver un à notre goût. Finalement, ce fût Aaron qui proposa que nous allions faire un tour du côté de la guilde de Blue Pegasus. « Je sais que tu ne les aimes pas mais au moins, on est sûrs de trouver à boire et à manger. » A boire, c'était certain. A manger, beaucoup moins. Évidemment, ils n'étaient pas moches, loin de là. Mais les voir se ridiculiser dans les magasines nous exaspérait au plus au point. Ah ça oui, ils avaient le physique. L'intellect ? Cela restait à voir. Il va sans dire que nous n'étions pas très exigeants pour des coups d'un soir mais se servir dans une autre guilde, et en plus dans une guilde remplie d'imbéciles...
Au bout de quelques minutes de réflexions, nous décidions finalement d'aller y faire un tour. Au pire, si nous ne trouvions pas à manger, nous y trouverions à boire avec certitude. Et nous irions ailleurs pour le reste de la soirée. C'est donc avec assurance que, quelques minutes plus tard, nous passions la porte de Blue Pegasus. La soirée battait son plein et la plupart des clients semblaient bien joyeux. Laissant de la place pour les danseurs particulièrement expressifs, nous nous dirigions donc vers le bar où quelques places restaient encore libres. Nous nous installons dans le coin. De là, nous pouvons observer quasiment tout ce qu'il se passe. Que ce soit le couple au fond de la salle s'embrassant à s'en étrangler comme le serveur qui discutait habilement avec la clientèle. « Il est pas mal non plus. » Szohr grogna. « T'as vraiment un sérieux problème, toi. Tu trouves tout le monde à ton goût. » Aaron sourit. « Je ne suis juste pas difficile. » Szohr leva les yeux au ciel face à cette affirmation. Puis nous décidions de lever le bras afin de héler le serveur qui prenait définitivement bien trop son temps. « Hey ! Une bière, s'il vous plaît ! » Il ne manquerait plus qu'il nous oublie. Mais on oubliait pas Szohr et Aaron. On pouvait les éviter, les détester, les aduler mais les oublier ? Ça, jamais.